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lundi 6 juillet 2009

26 juin

Crisse que j’en passe du temps avec toi les yeux fermés, assis sur un coussin, en silence.
Pour le « motton » ça s’améliore pas.
Particulièrement aujourd’hui.
Il a vraiment fallu que je fasse un effort pour ne pas éclater en sanglot.
Faire un effort. Un effort pour ne pas pleurer. Comme si la rivière pouvait faire un effort pour ne pas couler.
Comme si elle pouvait être intimidée par les nombreux baigneurs qui y nagent.
Je suis une rivière pudique. Je me détourne de mon cours. J’harnache le débit.
Et j’ouvre les yeux.
Même les yeux ouverts t’es partout mon bel amour.
Dans le minuscule bout de carotte dans mon assiette ce midi, sculpté joliment, comme un petit objet de perle finement ciselé.
Je l’imaginais tombé du ciel.
Direct dans mon assiette.
Un petit œuvre d’art cosmique de Paule.
T’es aussi dans le vent qui se lève, subitement, en chemin vers ma cabane dans la forêt : j’ai écarté les bras, je t’ai senti m’envelopper tout partout, par devant, par derrière, me soufflant dans les cheveux.
T’es partout pis j’te garde.
Tu sais que j’ai besoin de toi. Je suis tellement mêlé.
Mes petits projets s’inspirent de toi. Les petits trucs de la vie quotidienne tout comme les projections dans l’avenir.
Je marche dans la forêt et je te demande ton avis : « c’est-tu une bonne idée ça Minoue? »
Et j’observe.
J’attends que tu me fasses trébucher.
Où que le vent se lève.
Il m’arrive encore de ne pas y croire. De ne pas croire que t’es morte.
T’es si vivante en moi.
Comment est-ce possible que tu ne sois pas à la maison quand je vais rentrer dimanche.
Mon amour.
Cette joie de te retrouver après mes retraites, les petites pizzas de la boulangerie d’Abercorn que je ramenais pour s’éviter d’avoir rien d’autre à faire que de se retrouver.
Comme des ados fébriles plutôt que comme des presque quinquagénaires.
Et on se racontait chaque heure des 10 jours et des 10 nuits éloigné l’un de l’autre.
Ce que nous avions fait.
Ce que nous avions pensé.
On se jaugeait.
On se disait.
On se retrouvait.
T’étais aussi ma meilleure amie mon amour le savais-tu?
Je suis pas sûr que je le savais moi-même.
En cette nuit d’orage et de tonnerre sur ma petite cabane à flanc de montagne, je le sais maintenant.
Plus que jamais.